(Numéro 36 - Cyberdiffusion du 16-09-2001)

LE MOT DE LA SEMAINE  

Mes enfants et moi avons eu la peine, mercredi, de perdre Caroline, ma femme.
Dans le même temps, New-York s'embrase de folie meurtrière.
Il n'y a que les poètes et la poésie pour exprimer les émotions qui vous envahissent alors.
J'avais choisi un poème de Jacques Prévert, "Barbara", pour témoigner de l'horreur de la violence et du terrorisme.
Je le remplace par un autre d'Aragon qui est, bien sûr, pour évoquer Caroline.


Tandis que je parlais le langage des vers
Elle s'est doucement tendrement endormie
Comme une maison d'ombre au creux de notre vie
Une lampe baissée au cœur des myrtes verts

Sa joue a retrouvé le printemps du repos
O corps sans poids posé dans un songe de toile
Ciel formé de ses yeux à l'heure des étoiles
Un jeune sang l'habite au couvert de sa peau

La voila qui reprend le versant de ses fables
Dieu sait obéissant à quels lointains signaux
Et c'est toujours le bal la neige les traîneaux
Elle a rejoint la nuit dans ses bras adorables

Je vois sa main bouger Sa bouche Et je me dis
Qu'elle reste pareille aux marches du silence
Qui m'échappe pourtant de toute son enfance
Dans ce pays secret à mes pas interdit

Je te supplie amour au nom de nous ensemble
De ma suppliciante et folle jalousie
Ne t'en va pas trop loin sur la pente choisie
Je suis auprès de toi comme un saule qui tremble

J'ai peur éperdument du sommeil de tes yeux
Je me ronge le cœur de ce cœur que j'écoute
Amour arrête-toi dans ton rêve et ta route
Rends-moi ta conscience et mon mal merveilleux


Aragon - Poème à Elsa
   
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ET POUR FINIR
"Notre vrai tombeau n'est pas dans la terre, mais dans le cœur des hommes."
(Proverbe persan)
"Peu importe où j'irai après la mort, car, des deux côtés, j'ai des amis qui m'attendent."
(anonyme et pas éminemment catholique.)


BONNE SEMAINE