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MOT DE LA SEMAINE





 
Poésie : Mort


Charles Baudelaire Eugène Chavette Jacques Prevert Jean Cocteau Louis Aragon Paul Verlaine Robert Desnos Ronsard



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Sois sage, ô ma Douleur, et tiens toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici :
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci.

Pendant que des mortels la multitude vile,
Sous le fouet du Plaisir ce bourreau sans merci,
Va cueillir des remords dans la fête servile,
Ma Douleur, donne-moi la main, viens par ici,

Loin d'eux. Vois se pencher les défuntes Années,
Sur les balcons du ciel, en robes surannées ;
Surgir du fond des eaux le Regret souriant ;

Le Soleil moribond s'endormir sous une arche,
Et, comme un long linceul traînant à l'Orient,
Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.
Charles Baudelaire


C'est la mort qui console, hélas et qui fait vivre ;
C'est le but de la vie, et c'est le seul espoir
Qui, comme un élixir, nous monte et nous enivre
Et nous donne le cœur de marcher jusqu'au soir.
Charles Baudelaire
Les Fleurs du Mal - La Mort des pauvres


Harpagon, qui veillait son père agonisant,
Se dit, rêveur, devant ces lèvres déjà blanches :
"Nous avons au grenier un nombre suffisant,
Ce me semble, de vieilles planches ?"
Charles Baudelaire
Les Fleurs du Mal - L'Imprévu


Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;
( … )
Quand la pluie étalant ses immenses traînées
D'une vaste prison imite les barreaux,
Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées
Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,
( ... )
Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir,
Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.
Charles Baudelaire
Les Fleurs du Mal - Spleen
 

Pépin le bref est mort depuis bientôt mille ans.

MORALITE :
Quand on est mort, c'est pour longtemps.
Eugène Chavette
Fable-Express
 
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là
Et tu marchais souriante
Epanouie ravie ruisselante
Sous la pluie
Rappelle-toi Barbara
...
Oh Barbara Quelle connerie la guerre
Qu'es-tu devenue maintenant
Sous cette pluie de fer
De feu d'acier de sang
Et celui qui te serrait dans ses bras
Amoureusement
Est-il mort disparu ou bien encore vivant
...
Jacques Prévert
Paroles
 
Marbre n'écrase pas ce mort
Dont un nuage est la statue.
Jean Cocteau
Faire-part - A la mémoire de Claude Debussy


Je devrais vous rejoindre mes amis
dans ce système d'amour céleste.
Où la mort vous a-t-elle mis ?
Pourquoi veut-elle que je reste ?
Jean Cocteau
Faire-part - Poésies
 

Tandis que je parlais le langage des vers
Elle s'est doucement tendrement endormie
Comme une maison d'ombre au creux de notre vie
Une lampe baissée au coeur des myrthes verts

Sa joue a retrouvé le printemps du repos
O corps sans poids posé dans un songe de toile
Ciel formé de ses yeux à l'heure des étoiles
Un jeune sang l'habite au couvert de sa peau

La voila qui reprend le versant de ses fables
Dieu sait obéissant à quels lointains signaux
Et c'est toujours le bal la neige les traineaux
Elle a rejoint la nuit dans ses bras adorables

Je vois sa main bouger Sa bouche Et je me dis
Qu'elle reste pareille aux marches du silence
Qui m'échappe pourtant de toute son enfance
Dans ce pays secret à mes pas interdit

Je te supplie amour au nom de nous ensemble
De ma suppliciante et folle jalousie
Ne t'en va pas trop loin sur la pente choisie
Je suis auprès de toi comme un saule qui tremble

J'ai peur éperdument du sommeil de tes yeux
Je me ronge le coeur de ce coeur que j'écoute
Amour arrête-toi dans ton rêve et ta route
Rends-moi ta conscience et mon mal merveilleux
Louis Aragon (1880 - 1918)
Elsa


Mon bel amour mon cher amour ma déchirure
Je te porte dans moi comme un oiseau blessé
Et ceux -là sans savoir nous regardent passer
Répétant après moi les mots que j'ai tressés
Et qui pour tes grands yeux tout aussitôt moururent
Il n'y a pas d'amour heureux.
Louis Aragon (1880 - 1918)
La Diane Française


Il a donc grimpé toute sa vie vers cette crête d'où l'on aperçoit l'autre côté des choses, qui est mort et massacre avec la clangorante épopée, la chevauchée renouée des paladins modernes.

Il se retrouve [...] à cette charnière du monde qui sépare la vie ordonnée et sage du pays monstrueux des nuées [...].

Il est au seuil de la fureur inhumaine. Il va voir à quoi aboutit la longue patience constructive de la bonne volonté. [...]

Voici l'autre côté des choses, où se déversent des fleuves capricieux dans la vallée de la rigueur. Voici l'autre côté de la vie, où tous deviennent les jouets d'un même vent terrible, où les ombres dansent très haut, au-dessus des hommes, au-dessus des morts...
Louis Aragon
Les Voyageurs de l'impériale (1939)
 
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime,
Et qui n'est chaque fois , ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.
(…)
Son regard est pareil au regard des statues,
Et pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.
Paul Verlaine
Poèmes Saturniens - Mon rêve familier (1866)
 
Maudit !
soit le père de l'épouse
du forgeron qui forgea le fer de la cognée
avec laquelle le bûcheron abattit le chêne
dans lequel on sculpta le lit
où fut engendré l'arrière-grand-père
de l'homme qui conduisit la voiture
dans laquelle ton père rencontra ta mère.
Robert Desnos
La Colombe de l'arche - Corps et biens
 
Ecoute bûcheron, arrête un peu le bras !
Ce ne sont pas des bois que tu jettes à bas ;
Ne vois-tu pas le sang, lequel dégoûte à force,
Des Nymphes qui vivaient dessous la dure écorce.
Ronsard
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